Nous poursuivons notre série de résumés de décisions arbitrales rendues antérieurement dans l’espoir que cela aide les membres à mieux comprendre comment fonctionnent les normes et règles de la DRC qui s’appliquent lors d’un différend. Ces règles stipulent notamment que tout arbitrage administré par la DRC doit demeurer privé et confidentiel. C’est pourquoi nous ne divulguons pas le nom des personnes, des arbitres ni des entreprises en cause. Nous vous rappelons en outre que la DRC n’agit qu’à titre d’administrateur du processus d’arbitrage; elle ne participe pas aux audiences. En conséquence, ces précis sont produits à partir des seules notes de l’arbitre ayant entendu le litige et peuvent ne pas inclure d’importantes informations ayant été soumises par le biais de soumissions écrites ou de dépositions orales.
Cause : Dossier de la DRC no 20042 – Les parties sont du Mexique et du Canada
Les faits :
- Le 28 août 2017, le réclamant a vendu deux lots de mangues Kent à l’intimé : un premier lot était constitué de 2 340 cartons de calibre 7 au prix de de 4,50 $US le carton (9 945 $US), alors que le second lot contenait 1 800 cartons de calibre 8, également à 4,5 $US le carton (7 650 $US) pour un total de 17 595 $US. Selon la facture, les mangues ont été vendues FAB Laredo.
- Le 29 août 2017, l’intimé a ramassé les fruits à Laredo et les a livrés à ses clients à Montréal le 30 août.
- L’intimé a informé le réclamant que les mangues reçues étaient de variété Keith plutôt que de variété Kent ainsi qu’il avait commandé. En conséquence, ses clients lui retournaient les fruits.
- L’intimé a offert de payer 3,75 $US le carton plutôt que les 4,25 initialement prévus. Toutefois, le réclamant lui a répondu qu’il n’accepterait pas moins de 4,00 $US le carton.
- L’intimé a versé au réclamant une somme de 15 515 $US, c’est-à-dire 3,75 $US le carton pour les 2 340 cartons de calibre 7 et les 1 800 cartons de calibre 8. Le réclamant a accepté ce versement à titre de paiement partiel, n’ayant pas consenti de crédit ni de réduction du prix.
L’enjeu
À savoir s’il y eu bris de contrat et si l’intimé a subi des dommages.
Analyse et raisonnement de l’arbitre
Y a-t-il eu un bris dans l’accord convenu entre les parties portant sur la vente et l’achat de mangues Kent ou Keith?
Ni l’une ni l’autre des parties n’a étayé sa position, ni répondu aux questions de l’arbitre. En conséquence, l’arbitre est demeuré dans l’impossibilité de trancher entre les faits conflictuels lui ayant été soumis.
Il apparait hors de tout doute que des mangues ont été vendues et livrées à des acheteurs. Même si le réclamant n’a pas admis avoir expédié la mauvaise variété de mangues, les différentes factures et les textos le démontrent clairement. Fournir une variété autre que celle convenue constitue un bris de contrat. En cas de bris de contrat, une inspection fédérale n’est plus nécessaire. En outre, le réclamant n’a pas répondu aux questions de l’arbitre au sujet de la transaction.
Même s’il semble y avoir bris de contrat, il n’y a pas de preuve que les mangues aient été vendues à perte. Si l’intimé avait soumis une comptabilisation détaillée des ventes de mangues, il aurait étoffé sa position en documentant sa perte, prouvant ainsi les dommages subis.
Par ailleurs, dans les textos que se sont échangés les parties, le réclamant a offert d’accepter 4,00 $US plutôt que 4,25 $US l’unité.
La décision arbitrale rendue :
L’intimé a dû rembourser au réclamant la somme de 1 045 $US dans les 30 jours à compter de la date de la décision. Cependant, l’arbitre n’a pas exigé de l’intimé qu’il rembourse au réclamant les frais d’arbitrage de 600 $US.
Commentaires de la DRC :
Lorsque vous soumettez un exposé de la demande ou un exposé en défense contre la demande, assurez-vous qu’ils sont étayés par les faits. Si vous n’êtes pas certain de la bonne manière de documenter une réclamation, vous avez tout intérêt à recourir à un conseiller juridique pour vous aider à soumettre votre réclamation ou votre défense en bonne et due forme.
Si, en cours d’arbitrage, un arbitre vous demande des éclaircissements ou des renseignements additionnels, répondez-lui promptement, en incluant tout document en appui à votre réponse.
Pour que sa réclamation soit couronnée de succès, un expéditeur doit prouver trois éléments clés : 1. qu’il y a eu bris de contrat; 2. qu’un avis du bris de contrat a été donné; et 3. que des dommages ont bel et bien été subis.
Lorsque les parties ne peuvent s’entendre sur les modalités du contrat et que la documentation soumise à l’égard de la transaction n’apporte que peu d’éclaircissement, il incombe à chacune de prouver ses allégations. Dans ce cas-ci, les courriels échangés entre les parties ont prouvé à l’arbitre qu’on a expédié des mangues de la mauvaise variété. Cependant, deux fois l’intimé a omis de fournir les preuves qui aurait pu valider le montant versé au réclamant. D’abord dans son exposé en défense puis, en second lieu, lorsque l’arbitre les lui a demandées. La comptabilisation des ventes demeure la meilleure façon de prouver des dommages.
Pour en savoir davantage sur les articles des normes commerciales de la DRC auxquels il est fait référence dans le présent précis, veuillez consulter :
- UN REGARD EN ARRIERE – Ian Greig (Article paru dans l’édition décembre 2009 de Solutions)
- Obligations du destinataire (Normes commerciales de la DRC, art. 10 2.(b)(ii))
- Acceptation (Normes commerciales de la DRC, art.19, par. 1)
- Donner avis d’un problème à temps (Article paru dans l’édition de septembre 2018 de Solutions)